14 avril 1916
Ma chère Maman,
Tout s’est bien passé jusqu’ici quoique dans des conditions assez pénibles: 48 heures de chemin de fer, pluie lors du débarquement, etc. Enfin, nous espérons être mieux lorsque nous serons en position. Ne te fais surtout pas de bile pour moi; je suis enchanté d’être venu ici. J’ai pensé un peu à Jean Liénard car il a dû passer là où nous sommes cantonnés pour le moment. Je ne puis encore te donner d’adresse.
Ton fils qui t’embrasse bien fort
André Delepierre
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Samedi 15 avril 1916
Ma chère Maman (Ne montre pas cette lettre à B.M. Je lui en écrirai une paisible)
C’est d’une « cagna » confortable où je t’écris. Toute la batterie de tir s’est déjà installée et on a trouvé bien heureusement des abris tous faits. Dans celle où je suis, on est protégé avec 4 épaisseurs de gros rondins et de sable etc. Malheureusement, on ne peut pas faire de feu pendant la journée mais on s’arrangera pou manger chaud en allant faire la popote un peu en arrière.
En somme, on n’est pas mal du tout, quoique ça bombarde énergiquement.
Ne te fais surtout pas de bile. On vit ici en petit Crusoe et c’est assez amusant. Des Boches, nous ne sommes guère qu’à 2 kilomètres à peine et nous sommes entourés de canons de tous calibres français. il n’y a pas loin non plus de Verdun, à peine 12 kilomètres. Je vais presque tous les jours à l’échelon et là, c’est le filon pour manger; car on me demande des nouvelles des camarades et on n’oublie pas de me servir quelque chose de réconfortant. Enfin, je suis heureux de mon sort, et je te quitte en te priant de me dire combien de temps mettent mes lettres.
Pour l’argent, on m’a conseillé de le garder sur moi (j’ai 70 francs) en cas de malheur.
On ne sait ce qui peut arriver
Bon baisers à tous
A. Delepierre
Envoi de A. Delepierre M.d.L.
102ème Rgt artillerie lourde, 2ème batterie de 105
5è pièce. Secteur postal 36
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