CULTUROPOLIS

30 avril 1916

Ma chère petite Maman,

Je te remercie bien de mes bandes molletières et du mouchoir que j’ai reçus hier. Cela ma servira fort. J’ai également reçu hier une lettre d’Yvonne et de tante Emelie. Hier, j’ai pu acheter une petite boîte de lait condensé: ce n’est pas mauvais du tout, soit avec le café, soit avec le thé, car nous en touchons un peu ici. N’oublie pas, s.t.p., de me mettre qq. morceaux de sucre et un peu de sel et poivre dans tous les petits colis que tu m’enverras.; à propos de colis, adresse toit donc à la rue Palestro, comme j’en ai déjà parlé dans ma lettre d’hier à Yvonne. Il parait que l’on peut envoyer des colis gratuits aux soldats du front. Non, je n’ai reçu aucune nouvelle de Delachat: je ne sais ce qu’il est devenu. Ce matin, 2 avions allemands ont été abattus juste où se trouve l’échelon de notre batterie. 2 de moins pour nous repérer.

Le temps est toujours magnifique heureusement et les chemins seront bientôt presque secs. A mes moments de loisir, je m’amuse à fabriquer une petit cadran solaire dans un tronc d’arbre: ça ne fait pas mal du tout. Si ça marche bien, j’en ferai un bien comme souvenir. A part ça, rien de nouveau, sinon que les Boches nous marmitent plus depuis quelques jours. Ce n’est pas les éclats d’obus qui manquent par ici. Est-ce-que vous restez à Paris pour les grandes vacances? il vaut mieux que vous changiez un peu d’air. Dommage qu’il ne soit pas permis aux dames d’aller au front. J’aurais emménagé une « cagna » des plus confortables.

Ton fils qui t’aime de tout cœur

A. Delepierre