17 heures 30
Le taxi me dépose devant l’aérogare de départ de Milan Malpensa. Content de rentrer chez moi, à Saint Nom, après deux jours de réunion à Passirana, dans la banlieue milanaise. Avec quelques collègues, je me dirige machinalement vers la zone d’embarquement. Et là, j’ai soudain une étrange impression de malaise. Les gens passent devant moi comme anesthésiés, sans un sourire, presque mécaniquement. Au début, je ne comprends pas. Il faut que je regarde les écrans annonçant les départs pour m’apercevoir que tous les vols en provenance ou à destination des Etats-Unis sont annulés.
Il faut dire qu’à l’époque, les téléphones portables commençaient juste à nous envahir, que l’accès internet mobile n’existait pas et encore moins Facebook ou d’autres réseaux sociaux. Au passage de la sécurité, nous sommes fouillés comme jamais. Nous devons exhiber à trois endroits différents notre billet et nos papiers d’identité. Je me perds en conjectures lorsque, juste avant de pénétrer dans l’avion, ma voisine explique à une amie que New York a été attaquée et qu’il y aurait des milliers de morts. Comme une trainée de poudre, les passagers échangent les nouvelles les plus fantaisistes glanées ça et là auprès de leurs familles jointes au téléphone.
» Les tours du World Trade percutées par des avions de ligne »
« 40000 morts au moins »
« Le Pentagone pulvérisé »
« Aucune nouvelle de Georges Bush »
Le vol se passe dans un silence d’une lourdeur palpable. Personne n’a envie de parler, chacun se fait son propre scénario. En arrivant chez moi, la télé passe en boucle les images infernales. Je recolle à l’actualité, à moins que ce ne soit elle qui ne me rattrape. Les événements retrouvent leur dimension réelle et tragique.
Mélange de tristesse, de colère et d’incrédulité.
Ce mélange, on le connait bien aujourd’hui. Les pionniers de l’horreur sont passés par là en ouvrant une voie mortifère à leurs émules décérébrés…
(c) Musefabe 2016
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