Journal de Mélanie Croissant

Il n’est pas venu.
Oh, je sais ce que vous allez me dire: ma pauvre (presque) vieille fille, tu t’es encore monté une histoire idiote de prince charmant à deux sous. Et ce garçon, tu ne l’as vu qu’une fois ! Et à la sortie de la messe encore, au bras de sa maman ! Bien sûr, il m’a offert l’eau bénite, j’ai croisé son regard…ce regard.
J’étais chavirée comme une chaloupe folle, et jamais de tels yeux, brillants comme un éclat de jade, ne m’avaient touchée si profondément. Jamais un tel sourire ne m’avait tant émue. Jamais voix au timbre délicieux ne m’avait fait frissonner comme une plume de merle à la brise lunatique de l’hiver.
– Demain, je serai place Brécourt, avait-il dit dans un souffle.
A peine m’étais-je rendue compte que sa bouche m’avait parlé, que ses yeux m’avaient remarquée, à peine avais-je tremblé qu’il avait disparu.
Alors, ce matin, bien sûr, je suis venue. J’ai arpenté la place Brécourt mes livres sous le bras. J’en connais à présent tous les recoins, tous les secrets, tous les arbres et toutes les fleurs. Pour donner le change aux passants qui me croisaient, je faisais tourner mon ombrelle en prenant un air détaché. J’avais mis mon petit canotier à ruban vert et ma robe aux manches bouffantes et col de dentelle. Je l’ai attendu, maudit, aimé, pleuré…
Il se fait tard. La (presque) vieille fille va rentrer, remballer ses illusions de pacotille. Le banc restera, imprégné de mon attente, pour accueillir des amoureux, des vrais…
J’ai eu un étourdissement, pas grand chose, au bord des cils… Me sera-t-il pour toujours interdit d’aimer ?
(c) Musefabe 2006

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