Il était là, derrrière la porte, avec une sacoche d’où dépassaient des calendriers sous plastique.
– Je viens pour les handicapés, me dit-il, en exhibant une carte froissée avec sa photo. Bien propre, avec son costume cravate, il ébauche un sourire. S’il s’est farçi toutes les rues de Saint Nom, il doit avoir un moral d’acier.
Je fouille la poche de ma veste à la recherche de 5 euros contre lesquels il me remet un journal que je ne lirai sans doute pas. Puis il me donne le choix entre deux modèles, représentant respectivement trois poussins sortant du nid ou un épagneul tout seul en photo décolorée, dans un style tellement ringard qu’il propulse les calendriers de la poste à l’avant scène des gadgets branchés.
Eh bien, je vais vous l’avouer, je l’aime bien ce morceau de carton recyclé avec son épagneul tout seul au milieu. Il fleure bon la cuisine de mon enfance (on l’épinglait sur le buffet), la boite de banania et l’odeur du potage au vermicelles. Il est simple comme ces choses que l’on oublie et qui reviennent à la surface par surprise – petites bulles de mémoire qui pétillent, petits bonheurs qui font le bonheur.
Je me suis surpris à souhaiter qu’il revienne l’année prochaine. Cette fois, je lui prendrai les poussins.
(c) Musefabe 2005
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